Le père de la pilule, Lucien Neuwirth, est mort hier. Quand on pense que, s’il avait été conçu après son invention, ce type-là aurait pu ne jamais voir le jour, ça me rend dingue ! J’en parlais hier avec mon ami le philosophe Belge Jean-Claude Van Damme qui me faisait remarquer à juste titre que ce type avait vécu pour que d’autres gars aient le droit de ne pas vivre. Parce que s’il n’était pas né, alors la pilule n’aurait pas pu exister. Mais si la pilule avait existé, Lucien Neuwirth aurait pu ne jamais naître. D’ailleurs, combien de Mozart, combien de Staline n’ont-ils jamais pu voir le jour grâce à cet homme ? Nous ne le saurons jamais. Nous en étions à ces considérations dans une conversation que Socrate lui-même aurait sans doute goûtée s’il avait eu la chance de nous connaître, quand mon ami Jean Claude m’exposa son projet de traduire la « Phénoménologie de l’Histoire » en manga. Mais c’est un autre sujet dont je vous parlerai une prochaine fois si vous êtes sages, ce matin, on cause de la pilule.
Mine de rien, on est content qu’elle existe la pilule. On peut, grâce à la pilule, consommer avec sa légitime ou filer le guilledou avec sa maîtresse, voire pour les plus beaux tempéraments, faire les deux à la fois, sans courir le risque de grever le budget familial avec une nouvelle bouche à nourrir, ni d’agrandir une lignée de bâtards qu’un boulanger ne renierait pas.
Grâce à la pilule, fini la marmaille non désirée. Fini les mioches à la pelle, fini les fringues de l’aîné élimés par six successeurs, fini les chambrées à 3, 4 ou 8, fini les 21 frères et sœurs comme les enfants de Jean-Sébastien Bach, fini l’enfant subi, place maintenant à l’enfant choisi.
Or, qu’y a-t-il de mieux que l’enfant choisi ? L’enfant choisi, cette espèce de petit monstre tyrannique, qui prend toute la place parce qu’on a passé 9 mois au moins, mais souvent plus, à l’attendre, à le désirer, à l’imaginer et qu’on va le placer sur un trône avant même de le mettre sur le pot.
Qu’y a-t-il de mieux que l’enfant choisi ? L’enfant choisi, cette engeance démoniaque, le cauchemar des instituteurs qui ne peuvent plus mettre une mauvaise note ou faire une remontrance à ces petits chéris sans que les parents leur tombent sur le râble pour défendre leurs sales mômes.
Qu’y a-t-il de mieux que l’enfant choisi ? L’enfant choisi, ce boulet de 29 ans qui habite encore chez ses parents après trois ratages à la fac, deux en école de commerce et qui va commencer la semaine prochaine une formation macramé grâce à Pôle Emploi.
Ah, il est parfois des jours, croyez-en le contribuable que je suis, où la pilule peut être difficile à avaler.
La semaine prochaine, je vous parlerai des efforts non négligeables faits par le prix Nobel de la paix pour permettre à l’Iran de se doter de l’arme nucléaire.